Il était une fois, dit Bastiat – cela commence comme un conte de fées, et c’en est un, en effet, puisque l’on y trouve le secret magique qui permet de mettre en excédent les balances commerciales de tous les pays, donc de combler les vœux de tous les chefs de gouvernement, de tous les ministres et de toutes les Chambres de commerce du monde.
Il était une fois, donc, un capitaine au long cours qui transportait des marchandises entre la France et l’Angleterre. C’était l’époque où les commandants de navires achetaient leur cargaison et allaient la vendre à l’étranger. Celui-ci était un bon commerçant et un bon marin. Il acheta du vin de Bordeaux, qu’il choisit avec soin, et le paya un million. Puis il mit le cap sur l’Angleterre et la douane vigilante enregistra, à la sortie du port, une exportation d’un million.
Le navire accosta sans heurt les rives de la Tamise et le capitaine vendit aussitôt son chargement à de fins connaisseurs, qui lui donnèrent, en livres sterling, l’équivalent de deux millions de francs.